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de l’hélice, le clapotement des flots sur le bordage, et à regarder scintiller les lumières des phares jalonnant au loin la terre perdue dans la nuit.

L’aube du lendemain nous trouva sur le pont, d’où l’on apercevait déjà la côte de Corse, comme une ligne épaisse de brouillard dominée vers le sud-est par les crètes neigeuses des hautes montagnes. La mer, à présent calmée, laissait glisser le navire sans un cahotement ; l’air tiède, sans un souffle de brise, s’embaumait, malgré la distance, de l’odeur pénétrante des cistes, du parfum des maquis ; nous nous sentions entrés comme par enchantement sous un climat différent, et dans une atmosphère nouvelle.

Bientôt, derrière les montagnes du cap Corse, qui s’éclairaient depuis une heure de vives lueurs d’or, le soleil parut. Profondément saisis par la magnificence du spectacle, nous ne pouvions détacher les yeux du rivage qui se rapprochait et dont se distinguaient de mieux en mieux les détails. La citadelle de Calvi se dressait toute blanche sur un énorme rocher en promontoire qui commande l’entrée de la rade ; au bord du golfe s’allongeait une plaine étroite et basse semée de bouquets d’arbres où tranchait le feuillage cendré des oliviers et des eucalyptus ; puis, brusquement, se dressaient les montagnes, montrant leurs pentes escarpées couvertes de broussaille brune jusqu’au dessous des neiges devenues roses sous les premiers rayons du jour ; et ce tableau féerique se reflétait avec une pureté parfaite dans l’eau bleue et transparente où le soleil faisait briller par places de fines lames d’argent.

Après avoir contourné la citadelle, le vapeur jeta l’ancre en face de la Marina ou basse ville de Calvi. De