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résisteraient à un tel principe commenté par les mauvaises passions, et la liberté se détruirait elle-même par ses propres excès. En effet, dans l’état de liberté sans frein et sans bornes qu’on imagine, il arriverait à chaque instant que la satisfaction des désirs d’une partie des citoyens ne pourrait se réaliser que par le froissement des intérêts d’une autre partie. De là conflit, lutte et désordre ; et lorsque dans ce combat l’un des côtés l’emporterait, il y aurait oppression pour l’autre, oppression qui serait rendue plus dure par les querelles antérieures, en sorte que la liberté illimitée n’aboutirait en définitive qu’à la tyrannie. Nous conclurons donc en adoptant la définition qu’a donné de la liberté un homme qui est mort sous le poignard de l’anarchie. M. Rossi a dit : « La liberté ne peut être que l’exercice des facultés de l’homme mise en harmonie avec les nécessités et les exigences du corps social. »

9. Les hommes ont tous même origine, même nature, même destinée ; ils doivent donc être par rapport au droit public dans une position d’égalité. Mais les facultés physiques et morales varient avec les individus ; il y a là une cause d’inégalité qui ne provient pas de la loi humaine, et que celle-ci ne peut pas détruire. Cette cause d’inégalité est dans les vues de la Providence, qui, en créant les hommes pour la société, leur a donné des aptitudes différentes, de telle sorte que chacun d’eux pût concourir, dans la mesure de sa capacité, au bien général. Ainsi se trouve établie une hiérarchie indispensable à la conservation de la société. La seule égalité possible est donc l’égalité devant la loi, c’est-à-dire l’absence de privilèges ; chaque homme restant d’ailleurs maître de sa destinée et pouvant, par son travail, par son esprit de conduite, arriver aux