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le pouce crochu

manquait pas d’arroser matin et soir. Elle allait s’y mettre, lorsque le bruit d’une voiture qui s’arrêtait la fit tressaillir.

Elle tourna vivement la tête, et au lieu de celui qu’elle attendait, elle vit descendre d’un joli coupé madame Gémozac et son fils.

Ils ne pouvaient pas arriver plus mal à propos, mais il n’était plus temps de les éviter, et Camille vint à leur rencontre. Julien la salua et madame Gémozac l’embrassa sur les deux joues, en lui disant du ton le plus affectueux :

— Je viens vous chercher, ma chère enfant, puisque vous ne venez pas nous voir. On ne parle que de vous à la maison, et mon mari m’aurait accompagnée, si sa journée n’était pas prise par les affaires. Julien, qui n’est pas dans le même cas, a voulu absolument venir avec moi.

Camille balbutia quelques mots de remerciement, mais on voyait bien que son esprit était ailleurs.

— Comment avez-vous passé votre temps hier, après nous avoir quittés ? continua madame Gémozac. J’ai eu grand tort de vous laisser seule dans cette maison, qui ne vous rappelle que de tristes souvenirs. Et, en vérité, je suis obligée d’insister pour que vous la quittiez le plus tôt possible. Nous vous aimons tous, et j’espère que vous vous considérez comme étant de notre famille. Ne nous faites pas le chagrin de vivre si loin de nous.

— Je vous suis bien reconnaissante, madame, murmura la jeune fille, mais je vous ai dit pourquoi je désire rester comme je suis. J’ai un devoir à remplir, et tant que je n’aurai pas retrouvé le meurtrier de mon père…

— Quoi ! vous persistez dans cette idée, ma chère