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le pouce crochu

recours qu’à ce jeune homme pour tâcher de retrouver non seulement l’odieux Zig-Zag, mais encore et surtout Courapied et son fils qui venaient de payer si cher leur dévouement. Étaient-ils morts ou avaient-ils survécu à leur terrible chute ? Quoi qu’il en fût, Camille ne pouvait pas les abandonner. Elle se reprochait déjà d’avoir suivi les avis de M. de Menestreau qui lui conseillait de rentrer chez elle et de ne pas s’exposer à partager le sort de ses malheureux auxiliaires, en retournant cette nuit-là à la maison maudite.

Il avait eu cent fois raison de l’empêcher de courir à sa perte, mais il ne l’empêcherait certainement pas de tenter l’aventure dans des conditions plus favorables : à la clarté du jour et avec des armes plus sérieuses qu’un pistolet de poche, avec un ami surtout, un ami brave et sensé qui ne reculerait pas devant un danger, mais qui ne se risquerait qu’à bon escient.

Et cet ami ne pouvait être que le même M. de Menestreau. Camille ne voyait que lui qui fût en état de remplir ce rôle difficile et périlleux. S’il ne venait pas, elle n’avait plus qu’à s’adresser à cette police dont elle avait eu si peu à se louer après la mort de son père et qui ne lui inspirait plus la moindre confiance.

Elle reprit, en se levant, ses habits de deuil et Brigitte la fit déjeuner sans parvenir à la distraire des sombres préoccupations qui l’assiégeaient. Camille comptait les heures et se promettait de ne pas attendre indéfiniment. Elle ne tenait plus en place et pour tromper son impatience, elle descendit dans ce qu’elle appelait son jardin, c’est-à-dire dans l’enclos qui entourait la maisonnette. Elle y cultivait quelques plates-bandes où elle avait semé des graines qui commençaient à pousser et qu’elle ne