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le pouce crochu

Là, elle entre en plein pays de Bohème. Elle passe d’abord sur le territoire des chiffonniers qui campent à la belle étoile, ou peut s’en faut et se nourrissent dans des gargots, où on leur sert des aliments sans nom et des boissons au vitriol.

Ce n’est rien encore. Les chiffonniers sont presque tous de braves gens, qui travaillent la nuit et qui dorment le jour. Mais la route arrive à Clichy, en passant sous la voûte du chemin de fer de l’Ouest, un vrai souterrain où on peut assommer un homme sans craindre d’être dérangé pendant l’opération.

À droite, s’étendent des terrains vagues où viennent dormir les vagabonds et les malfaiteurs. Puis, viennent des ruelles fangeuses, des impasses sombres, des passages qui sont des coupe-gorges, et la cité du Soleil, ainsi nommée parce qu’elle est entourée d’une ceinture de tournesols, car le soleil ne s’y montre guère.

Et ce n’est pas fini. Plus il s’étend, plus ce chemin maudit s’enfonce dans l’horrible.

Au delà du carrefour où s’étaient arrêtés Camille Monistrol et ses auxiliaires, il y a d’autres repaires échelonnés des deux côtés. Chaque rue rappelle un souvenir judiciaire. Le sang y a coulé.

Et c’était dans cette direction que l’horrible dogue cherchait à entraîner Courapied.

— Allons ! murmura le pauvre pitre, résigné à tout, Zig-Zag est probablement caché dans la cité Foucault. Nous ne pouvions pas plus mal tomber. Sur cent locataires de la Femme en culottes, il y en a quatre-vingts qui sortent de Mazas.

— Marchons ! dit résolument Camille.

Il fallut obéir. Seulement, elle se renseigna tout en che-