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les mystères de montréal

— Comment ne le serais-je pas, dans la condition où je me trouve ? Mon père est en exil et avec lui un jeune homme que j’estime. Tu sais comme nous les manquons à la maison. Et dans les petites réunions comme celle de ce soir, je pense à Paul Turcotte, il aimait tant cela, lui, c’était son genre…

Jeanne en parlant ainsi devint plus triste. Sa compagne reprit :

— Il y en a plusieurs qui oublieraient Paul Turcotte, si elles étaient à ta place, en face des galanteries du jeune marchand.

— Charles Gagnon ?…

— Oui, oui.

— Mais comment ?… quelles galanteries ?…

— Eh bien oui, j’appelle cela un galant, un jeune homme qui veille sur toi comme un ange gardien.

— Franchement, Berthe, tu me surprends, et je pense que Charles Gagnon, quoiqu’il me rencontre quelquefois, n’a aucune intention.

— Tu le penses, mais il peut en être autrement.

— Cela me surprendrait…

— Bien que Charles se fut conduit adroitement, certaines jeunes filles avaient eu une vague idée que son amour pour la fille du proscrit n’était pas éteint.

Charles se rendit assidûment au bazar. Il était toujours accompagné d’autres jeunes gens et dépensait rondement mais pas plus à la table de Jeanne qu’à celle des autres.

Un soir il se trouva à se promener avec Jeanne dans