Paul Turcotte s’occupait peu des commentaires que son coup de théâtre suscitait. Ce qu’il lui importait était de retrouver Jeanne Duval.
Il la retrouva facilement.
Les deux fiancés de Saint-Denis se revirent fidèles au vieux serment de 1837. Les années parsemées d’écueils n’avaient rien changé à leurs sentiments. Ils avaient vieilli, chacun de sept ans, mais leur amour était encore dans toute sa jeunesse.
Depuis la scène du bal, ils se revirent souvent, et un soir, que, selon leur habitude, ils s’entretenaient sur le passé, dont chaque événement était vivace dans leurs mémoires, Paul dit à Jeanne :
— Pourquoi rappeler ces tristes souvenirs, ils nous percent le cœur pour rien, occupons-nous donc du présent… À quand le grand, l’heureux jour ?
La jeune fille rougit et baissa la tête, comme en ce soir lointain de 37, quand le même jeune homme lui avait posé la même question sur les bords du Richelieu.
— Quand il plaira à Dieu, répondit-elle dans un sourire langoureux. Remettons tout entre ses mains ; nous avons proposé souvent, il a toujours disposé.
— Oh, notre temps d’épreuves doit être fini… reprit le patriote. N’avons-nous pas suffisamment éprouvé notre amour au creuset de l’adversité ?… Cependant, si tu es de mon opinion, nous attendrons après le procès de ce misérable Charles… La cour criminelle s’ouvrira le 25 de ce mois et nous sommes