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supposition absurde — cela ne fait rien à la chose, reprit Braun. Écoutez, Jeanne, ce que je vais vous dire… Monsieur de Courval est atteint d’une maladie mortelle qui l’emportera avant six mois…

— Monsieur de Courval !

— Oui, il est sujet aux syncopes de cœur et il est rendu au bout… Il y a quelques semaines, au club, il a failli nous rester dans les bras… Il ferait son testament en votre faveur, et vous seriez la plus riche veuve de Montréal… Alors, si Paul Turcotte revenait du fond de l’Atlantique, il vous retrouverait libre comme avant… Comprenez-vous l’avantage de cette union ?…

— Il y aurait un grand avantage mais il y aurait un désavantage plus grand encore, si je brisais le serment que j’ai fait en 1837… D’ailleurs, ajouta Jeanne, je n’aime pas monsieur de Courval et je ne veux pas me marier…

Son beau-frère se leva ; il était plus qu’impatienté :

— Folle, dit-il, folle, je vous ferai interner dans un asile d’aliénés si vous persistez dans vos idées… Vous êtes à ma merci… Votre héritage que vous m’avez confié, il y a un an, a été englouti dans la catastrophe d’hier… Désormais vous serez sans le sou.

— Vous avez dépensé mon héritage ! fit la jeune fille, en se précipitant vers son beau-frère.

— Je l’ai perdu, répondit-il.

— Vous me le rendrez et j’irai vivre ailleurs. Je vous laisserai pour toujours.