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les mystères de montréal

car il était superstitieux. Mais la tête lui tournait trop pour s’arrêter à ces considérations.

Il vint avertir son maître que tout était prêt. Celui-ci, le prenant nerveusement par le bras, l’entraîna dans la salle à diner.

Cette chambre était faiblement éclairée. Sur la table au milieu des argenteries, étaient plusieurs bouteilles et deux verres, l’un complètement vide, l’autre à demi.

Un individu, que Lafleur reconnut comme Matson, qui était depuis quelques jours l’hôte du banquier, dormait profondément, assis dans un grand fauteuil.

Son sommeil était si profond, si tranquille, que Lafleur se crut en face d’un cadavre. fallait-il chercher la cause de cet état léthargique ? Assurément ce n’était pas dans les liqueurs étalées sur la table ; ou bien on y avait mêlé un narcotique puissant.

— Nous allons le transporter dans la voiture, dit le banquier, en désignant cet homme à son domestique. Prends-lui les pieds : je me charge de la tête.

Lafleur obéit sans comprendre ce qu’il faisait.

Il aida de Courval à entrer l’homme endormi dans la voiture et lui demanda, en montant sur le devant du landau, de quel côté il fallait aller.

— Monte sur la rue Sainte-Catherine jusqu’au chemin neuf. Là, tu descendras sur les quais.

On eut dit que l’ancien capitaine du Solitaire choisissait à dessein les rues obscures et peu fréquentées. Car à cette époque, ce qui est aujourd’hui la rue Sainte-Catherine, n’était qu’un chemin tortueux et sans nom