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les mystères de montréal

ce chien d’Outeiro… Je t’ai promis la place d’honneur parce que tu me l’as demandé le premier. Acceptes-tu le défi d’Ivanko ?

Refuser eut été un signe de peur d’être vaincu. Jamais un Guaranis, même le plus lâche, n’a reculé devant un défi. Plusieurs sachant que la mort les attendait en acceptant, n’ont pas décliné l’honneur de se battre. Ils sont morts mais ils n’ont pas dérogé à la coutume de leurs ancêtres.

Kaposa accepta le défi.

On coupa une branche de nopal : on y attacha un minerai brillant, et on planta le tout au sommet d’une hutte.

— À vingt pas ! dit Ivanko.

— À vingt pas ! répéta Kaposa.

En comptant la distance convenue on banda les arcs.

Le plus âgé tira le premier. La flèche de Kaposa siffla dans les airs et passa au-dessus de la hutte sans atteindre la branche de nopal.

Ivanko tira à son tour, après qu’il eût selon son habitude visé durant quelques secondes.

Toute la tribu fit entendre un hourrah formidable : le minerai venait de tomber à terre.

Kaposa avait bandé son arc pour tirer une seconde fois, ne pensant pas que son adversaire triompherait au premier coup. Il la brisa de dépit sur son genoux et la jeta dans les buissons, puis il s’éloigna pour aller passer sa déception sur la grève de l’île.