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les mystères de montréal

sachant combien terribles étaient les colères de son beau-frère et ne voulant pas l’exciter davantage.

— Jeanne, reprit le membre du « London Club » dont la voix commençait à trembler, le banquier sera ici ce midi ; je ne prétends pas qu’on lui fasse des grossièretés…

— Je n’en ai jamais fait à personne, reprit la fiancée du patriote, et je n’ai pas l’intention de déroger à mes habitudes.

— Alors ne manquez pas d’étudier le banquier. De Courval est un beau nom : vingt mille piastres à dépenser par année, avec la perspective d’en avoir deux fois plus avant longtemps, est magnifique, séduisant…

Sur ce le beau-frère sortit du boudoir. La fiancée de 1837 resta seule, malgré son énergie elle éclata en sanglots.

— Mon Dieu, murmura-t-elle, soutenez moi jusqu’à la fin de cette lutte si âpre. Si Paul Turcotte est encore vivant, faites que je meure plutôt que d’en épouser un autre.

Jeanne Duval n’avait jamais désespéré. On était venu lui apprendre la disparition de son fiancé ; on essayait de lui prouver par des arguments irréfutables qu’elle ne le reverrait point. Il y avait quelque chose qui lui disait de ne pas croire.

Elle passa son mouchoir sur ses yeux et sortit du boudoir.

C’était l’heure de la grand’messe. Elle monta à sa