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les mystères de montréal

On voyait sur les lèvres du traître un sourire malin : il tenait sa victime.

Le fils du maître de poste s’éloigna la rage dans le cœur.

— Ah ! balbutia-t-il en s’acheminant sur le chemin du roi, Charles Gagnon agit bassement, je me vengerai, je le jure par le souvenir sacré d’Améline : jamais il n’épousera Jeanne Duval.

Il passait alors devant le cimetière et l’épitaphe blanche d’Améline Lanctôt frappa ses yeux. Il s’arrêta un instant comme pour se rappeler son bonheur passé et il continua en pensant :

— Charles n’épousera jamais la fiancée du proscrit… Je le dénoncerai à temps : rira bien qui rira le dernier !

Quatre mois après la confiscation de la première lettre il en arriva une dernière venant de Paul. Elle contenait les dernières paroles d’un amoureux qui se croit abandonné.

Elle était écrite d’une main tremblante. Martel reconnut à peine l’écriture de son ami d’autrefois.

Il la passa à Charles qui eut un sourire de satisfaction en voyant son œuvre. Il alluma une allumette et mit le feu à la lettre. En un clin d’œil elle ne fut plus qu’un peu de cendre, à peine de quoi remplir un dé.

Peu après le jeune marchand fit un voyage d’affaire à Montréal et le lendemain de son retour on lisait dans les colonnes du Hérald l’entrefilet suivant :

« Fin tragique d’un jeune Canadien-français

« Le World de New-York nous apprend que le trois-