aisément les rivaux. En remontant davantage encore dans notre littérature, on trouverait même déjà de curieux essais de strophes en prose. Buffon, qui ne fit rien que de parfait, excellait à cela aussi. Sa phrase la plus célèbre en peut servir de témoignage :
La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite
Est celle de ce fier et fougueux animal
Qui partage avec lui les fatigues de la guerre
Et la gloire des combats.
Si l’on veut bien lire cette phrase de prose selon la diction de la prose, c’est-à-dire en élidant les e muets de conquête, fatigues et gloire, c’est la strophe classique de Malherbe. L’exemple est d’autant plus significatif que l’éloignement de son auteur à l’égard de la poésie est un fait assez connu ; mais la prose des poètes en offrirait de plus fréquents. La longue déclaration de Fortunio à Jacqueline est écrite tout entière en vers de huit syllabes coupés de vers de dix.
L’assaut de Notre-Dame contient quelques-uns des plus beaux alexandrins d’Hugo. Renan, qui eût été poète, sans la contrainte de sa jeunesse religieuse, avait parfois la coquetterie de faire reposer un chapitre sur douze pierres inébranlables.
Toutefois, ce sont là des exceptions assez généralement condamnées. Si l’octosyllabe, en effet, peut être pris pour l’élément rythmique de toute prose chantante et mesurée, par contre, l’alexandrin soli-