Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes.djvu/85

Cette page n’a pas encore été corrigée

la face de la nature est changée d’ici à la Chine ; d’autres visages, d’autres figures, d’autres mœurs, & presque d’autres principes de raisonnement. D’ici à la lune, le changement doit être bien plus considérable. Quand on va vers de certaines terres nouvellement découvertes, à peine sont-ce des hommes que les habitants qu’on y trouve, ce sont des animaux à figure humaine, encore quelquefois assez imparfaite, mais presque sans aucune raison humaine. Qui pourroit pousser jusqu’à la Lune, assurément ce ne seroient plus des hommes qu’on y trouverait.

Quelles sortes de gens seraient-ce donc ? reprit la Marquise avec un air d’impatience. De bonne foi, Madame, répliquai-je, je n’en sais rien. S’il se pouvoit faire que nous eussions de la raison, & que nous ne fussions pourtant pas hommes, & si d’ailleurs nous habitions la Lune, nous imaginerions-nous bien qu’il y eût ici-bas