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Nous voyons que toutes les planètes sont de la même nature, toutes des corps opaques qui ne reçoivent de la lumière que du soleil, qui se la renvoient les uns aux autres, et qui n’ont que les mêmes mouvemens, jusque là tout est égal. Cependant, il faudroit concevoir que ces grands corps auroient été faits pour n’être point habités, que ce seroit là leur condition naturelle, et qu’il y auroit une exception justement en faveur de la terre toute seule. Qui voudra le croire le croie ; pour moi, je ne m’y puis pas résoudre. Je vous trouve, dit-elle, bien affermi dans votre opinion depuis quelques instants. Je viens de voir le moment que la lune seroit déserte, et que vous ne vous en souciez pas beaucoup, et présentement, si on osoit vous dire que toutes les planètes ne sont pas aussi habitées que la terre, je vois bien que vous vous mettriez en colère. Il est vrai, répondis-je, que dans le moment où vous venez de me surprendre, si vous m’eussiez contredit sur les habitants des planètes, non seulement je vous les aurois soutenus, mais je crois que je vous aurois dit comment ils étoient faits. Il y a des momens pour croire, et je ne les ai jamais si bien crus que dans celui-là ; présentement même que je suis un peu plus de sang-froid, je ne laisse pas de trouver qu’il seroit bien étrange que la terre fût aussi habitée qu’elle l’est, et que les autres planètes