Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il est vrai qu’ils ne nous voient pas décrire un cercle autour d’eux ; mais il n’importe, voici ce que c’est. La moitié de la lune qui se trouva tournée vers nous au commencement du monde y a toujours été tournée depuis ; elle ne nous présente jamais que ces yeux, cette bouche et le reste de ce visage que notre imagination lui compose sur le fondement des taches qu’elle nous montre. Si l’autre moitié opposée se présentoit à nous, d’autres taches différemment arrangées nous feroient sans doute imaginer quelque autre figure. Ce n’est pas que la lune ne tourne sur elle-même, elle y tourne en autant de temps qu’autour de la terre, c’est-à-dire en un mois ; mais lorsqu’elle fait une partie de ce tour sur elle-même, et qu’il devroit se cacher à nous une joue, par exemple, de ce prétendu visage et paraître quelque autre chose, elle fait justement une semblable partie de son cercle autour de la terre, et se mettant dans un nouveau point de vue, elle nous montre encore cette même joue. Ainsi la lune, qui à l’égard du soleil et des autres astres tourne sur elle-même, n’y tourne point à notre égard. Ils lui paraissent tous se lever et se coucher en l’espace de quinze jours, mais pour notre terre, elle la voit toujours suspendue au même endroit du Ciel. Cette immobilité apparente ne convient