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se sont avancés, de sorte que tous ses agrémens sont évanouis, et que l’on craint même pour ses jours.

Que me contez-vous là ? interrompit la Marquise. Ce n’est point une plaisanterie, repris-je. On apercevoit dans la Lune une figure particulière qui avoit de l’air d’une tête de femme qui sortoit d’entre des rochers, et il est arrivé du changement dans cet endroit-là. Il est tombé quelques morceaux de montagnes, et ils ont laissé à découvert trois pointes qui ne peuvent plus servir qu’à composer un front, un nez, et un menton de vieille. Ne semble-t-il pas, dit-elle, qu’il y ait une destinée malicieuse qui en veuille particulièrement à la beauté ? Ç’a été justement cette Demoiselle qu’elle a été attaquer sur toute la Lune. Peut être qu’en récompense, répliquai-je, les changemens qui arrivent sur notre Terre embellissent quelque visage que les gens de la Lune y voient ; j’entends quelque visage à la manière de la Lune, car chacun transporte sur les objets les idées dont il est rempli. Nos Astronomes voient sur la Lune des visages de demoiselles, il pourroit être que des femmes, qui observeraient, y verroient de beaux visages d’hommes. Moi, Madame, je ne sais si je ne vous y verrois point. J’avoue, dit-elle, que je ne pourrois pas me défendre