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pas avoir désormais d’empressement pour aucune chose. Assurément, si on a tant d’ardeur de s’agrandir, si on fait desseins sur desseins, si on se donne tant de peine, c’est que l’on ne connaît pas les tourbillons. Je prétends bien que ma paresse profite de mes nouvelles lumières, et quand on me reprochera mon indolence, je répondrai : Ah ! si vous saviez ce que c’est que les étoiles fixes ! Il faut qu’Alexandre ne l’ait pas su, répliquai-je, car un certain auteur qui tient que la Lune est habitée, dit fort sérieusement qu’il n’étoit pas possible qu’Aristote ne fût dans une opinion si raisonnable (comment une vérité eût-elle échappé à Aristote ?), mais qu’il n’en voulut jamais rien dire, de peur de fâcher Alexandre, qui eût été au désespoir de voir un monde qu’il n’eût pas pu conquérir. À plus forte raison lui eût-on fait mystère des tourbillons des étoiles fixes, quand on les eût connus en ce temps-là ; c’eût été faire trop mal sa cour que de lui en parler. Pour moi qui les connois, je suis bien fâché de ne pouvoir tirer d’utilité de la connoissance que j’en ai. Ils ne guérissent tout au plus, selon votre raisonnement, que de l’ambition et de l’inquiétude, et je n’ai point ces maladies-là. Un peu de faiblesse pour ce qui est beau, voilà mon mal, et je ne crois pas que les tourbillons y puissent