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Toute la question de la prééminence entre les anciens et les modernes étant une fois bien entendue, se réduit à savoir si les arbres qui étaient autrefois dans nos campagnes étaient plus grands que ceux d’aujourd’hui. En cas qu’ils l’aient été, Homère, Platon, Démosthène, ne peuvent être égalés dans ces derniers siècles, mais si nos arbres sont aussi grands que ceux d’autrefois, nous pouvons égaler Homère, Platon et Démosthène.

Éclaircissons ce paradoxe. Si les anciens avaient plus d’esprit que nous, c’est donc que les cerveaux de ce temps-là étaient mieux disposés, formés de fibres plus fermes ou plus délicates, remplis de plus d’esprits animaux; mais en vertu de quoi les cerveaux de ce temps-là auraient-ils été mieux disposés? Les arbres auraient donc été aussi plus grands et plus beaux; car si la nature était alors plus jeune et plus vigoureuse, les arbres aussi bien que les cerveaux des hommes auraient dû se sentir de cette vigueur et de cette jeunesse.

Que les admirateurs des anciens y prennent un peu garde; quand ils nous disent que ces gens-là sont les sources du bon goût et de la raison, et les lumières destinées à éclairer tous les autres hommes, que l’on