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rendaient quelquefois. Par exemple, un homme qui venait demander aux dieux ce qu’il devait faire pour devenir riche, ils lui répondaient agréablement « qu’il n’avait qu’à posséder tout ce qui est entre les villes de Sicyone et de Corinthe. » Aussi badinait-on quelquefois avec eux. Polémon dormant dans le temple d’Esculape pour apprendre de lui le moyen de se guérir de la goutte, le dieu lui apparut et lui dit : « Qu’il s’abstînt de boire froid. » Polémon lui répondit : « Que ferais-tu donc, mon bel ami, si tu avais à guérir un bœuf ? » Mais ce ne sont là que des gentillesses de prêtres qui s’égayaient quelquefois, et avec qui on s’égayait aussi.

Ce qui est le plus essentiel, c’est que les dieux ne manquaient jamais de devenir amoureux des belles femmes ; il fallait qu’on les envoyât passer des nuits dans les temples, parées de la main même de leurs maris, et chargées de présents pour payer le dieu de ses peines. À la vérité, on fermait bien les temples à la vue de tout le monde, mais on ne garantissait point aux maris le chemin souterrain.

Pour moi, j’ai peine à concevoir que de pareilles choses aient pu être pratiquées seulement une fois. Cependant Hérodote nous assure qu’au huitième et dernier étage de cette superbe tour du temple de Bélus à Babylone, était un lit magnifique où couchait toutes les nuits une femme choisie par le dieu. Il s’en faisait autant à Thèbes en Égypte Et quand la prêtresse de l’oracle de Patare en Lycie devait prophétiser, il fallait auparavant qu’elle couchât seule dans le temple où Apollon venait l’inspirer.