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« Premièrement, dit-il, Apollon n’a jamais parlé latin. Secondement, les Grecs ne connaissent point cet oracle. Troisièmement, Apollon, du temps de Pyrrhus, avait déjà cesse de faire des vers. Enfin, quoique les Éacides, de la famille desquels était Pyrrhus, ne fussent pas gens d’un esprit bien fin ni bien pénétrant, cependant l’équivoque de l’oracle était si manifeste, que Pyrrhus eût dû s’en apercevoir... Mais ce qui est le principal, pourquoi y a-t-il déjà longtemps qu’il ne se rend plus d’oracles à Delphes de cette sorte, ce qui fait qu’il n’y a présentement rien de plus méprisé ? »

C’est sur ces dernières paroles que l’on s’est fondé pour dire que, du temps de Cicéron, il ne se rendait plus d’oracles à Delphes.

Mon auteur dit qu’on se trompe, et que ces mots : Pourquoi ne se rendit-il plus d’oracles de cette sorte ? marquent bien que Cicéron ne parle que des oracles en vers, puisqu’il était alors question d’un oracle renfermé en un vers.

Je ne sais s’il faut être tout à fait de son avis : car voici comme Cicéron continue immédiatement : « Ici, quand on presse les défenseurs des oracles, ils répondent que cette vertu, qui était dans l’exhalaison de la terre, et qui inspirait la Pythie, s’est évaporée avec le temps. Vous diriez qu’ils parlent de quelque vin qui a perdu sa force. Quel temps peut consumer ou épuiser une vertu toute divine ? Or, qu’y a-t-il de plus divin qu’une exhalaison de la terre qui fait un tel effet sur l’âme, qu’elle lui donne, et la connaissance de l’avenir, et le moyen de s’en expliquer en vers ? »