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Les sorts étaient le plus souvent des espèces de dés, sur lesquels étaient gravés quelques caractères, ou quelques mots dont on allait chercher l’explication dans des tables faites exprès. Les usages étaient différents sur les sorts : dans quelques temples, on les jetait soi-même ; dans d’autres, on les faisait sortir d’une urne, d’où est venue cette manière de parler si ordinaire aux Grecs, le sort est tombé.

Ce jeu de dés était toujours précédé de sacrifices et de nombreuses cérémonies. Apparemment les prêtres savaient manier les dés ; mais s’ils ne voulaient pas prendre cette peine, ils n’avaient qu’à les laisser aller ; ils étaient toujours maîtres de l’explication.

Les Lacédémoniens allèrent un jour consulter les sorts de Dodone, sur quelque guerre qu’ils entreprenaient ; car outre les chênes parlants, et les colombes, et les bassins, et l’oracle, il y avait encore des sorts à Dodone. Après toutes les cérémonies faites, sur le point qu’on allait jeter les sorts avec beaucoup de respect et de vénération, voilà un singe du roi des Molosses, qui, étant entré dans le temple, renverse les sorts et l’urne. La prêtresse, effrayée, dit aux Lacédémoniens qu’ils ne devaient pas songer à vaincre, mais seulement à se sauver ; et tous les écrivains (Cicéron, livre Il de la Divination) assurent que jamais Lacédémone ne reçut un présage plus funeste.

Les plus célèbres entre les sorts étaient à Préneste et à Antium, deux petites villes d’Italie. À Préneste était la Fortune, et à Antium les Fortunes.

Les Fortunes d’Antium avaient cela de remarquable, que c’étaient des statues qui se remuaient d’elles-mêmes, selon le témoignage de Macrobe (livre I, chapitre XXIII),