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et il semble de plus que les cavernes inspirent d’elles-mêmes je ne sais quelle horreur qui n’est pas inutile à la superstition. Dans les choses qui ne sont faites que pour frapper l’imagination des hommes, il ne faut rien négliger. Peut-être la situation de Delphes a-t-elle bien servi à la faire regarder comme une ville sainte. Elle était à moitié chemin de la montagne du Parnasse, bâtie sur un peu de terre-plein et environnée de précipices qui la fortifiaient sans le secours de l’art. La partie de la montagne qui était au-dessus avait à peu près la figure d’un théâtre, et le cri des hommes et le son des trompettes se multipliaient dans les rochers. Croyez qu’il n’y avait pas jusqu’à ces échos qui ne valussent leur prix.

La commodité des prêtres et la majesté des oracles demandaient donc également des cavernes ; aussi ne voyez-vous pas un si grand nombre de temples prophétiques en plat pays ; mais, s’il y en avait quelques-uns, on savait bien remédier à ce défaut de leur situation : au lieu de cavernes naturelles, on en faisait d’artificielles, c’est-à-dire de ces sanctuaires qui étaient des espèces d’antres où résidait particulièrement la divinité et où d’autres que les prêtres n’entraient jamais.

Quand la Pythie se mettait sur le trépied, c’était dans son sanctuaire, lieu obscur et éloigné d’une certaine petite chambre où se tenaient ceux qui venaient consulter l’oracle. L’ouverture même de ce sanctuaire était couverte de feuillages de laurier, et ceux à qui on permettait d’en approcher n’avaient garde d’y rien voir.

D’où croyez-vous que vienne la diversité avec laquelle les anciens parlent de la forme de leurs oracles ? C’est