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de la vie des démons ; car ce sont des démons que les nymphes dont il parle dans l’endroit que nous allons citer, et Plutarque l’entend ainsi : « Une corneille, dit Hésiode, vit neuf fois autant qu’un homme ; un cerf quatre fois autant qu’une corneille ; un corbeau trois fois autant qu’un cerf ; le phénix neuf fois autant qu’un corbeau ; et les nymphes, enfin, dix fois autant que le phénix. »

On ne prendrait volontiers tout ce calcul que pour une pure rêverie poétique, indigne qu’un philosophe y fasse aucune réflexion, et indigne même qu’un poète l’imite ; car l’agrément y manque autant que la vérité ; mais Plutarque n’est pas de cet avis. Comme il voit qu’en supposant la vie de l’homme de soixante-dix ans, ce qui en est la durée ordinaire, les démons devraient vivre six cent quatre-vingt mille quatre cents ans, et qu’il ne conçoit pas bien qu’on ait pu avoir l’expérience d’une si longue vie dans les démons, il aime mieux croire qu’Hésiode, par le mot d’âge d’homme, n’a entendu qu’une année. L’interprétation n’est pas trop naturelle ; mais sur ce pied-là on ne compte pour la vie des démons que sept mille neuf cent vingt ans, et alors Plutarque n’a plus de peine à concevoir comment on a pu expérimenter que les démons vivaient ce temps-là. De plus, il remarque dans le nombre de sept mille neuf cent vingt de certaines perfections pythagoriciennes qui le rendent tout à fait digne de marquer la durée de la vie des démons. Voilà les raisonnements de cette antiquité si vantée.

Des poèmes d’Homère et d’Hésiode, les démons ont passé dans la philosophie de Platon. Il ne peut être trop loué de ce qu’il est celui d’entre les Grecs qui a