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l’enrichir, et d’avancer la botanique, qu’il inspira au roi le dessein d’envoyer M. de Tournefort en Grèce, en Asie et en Égypte. Quand les fonds destinés au jardin manquaient dans des temps difficiles, Fagon y suppléait, et n’épargnait rien, soit pour conserver les plantes étrangères dans un climat peu favorable, soit pour en acquérir de nouvelles dont le transport coûtait beaucoup. Ce petit coin de terre ignorait presque sous sa protection les malheurs du reste de la France.

Il avait aussi beaucoup d’affection pour la faculté de médecine de Paris, dont il était membre ; elle trouvait en lui, dans toutes les occasions, un agent fort zélé auprès du roi ; il maintenait en vigueur les privilèges qui lui ont été accordés, et que des usages contraires, si on les tolérait, aboliraient aisément, même sous quelque apparence du bien public. Peut-être dans des cas particuliers n’a-t-il été que trop ferme en faveur de sa faculté contre ceux qui n’en étaient pas ; mais tous les cas particuliers seraient d’une discussion infinie, et les exceptions d’une dangereuse conséquence. Si la loi est juste en général, il faut lui passer quelques applications malheureuses.

On peut juger par-là que Fagon n’aura pas fait beaucoup de grâce aux empiriques. Ces sortes de médecins, d’autant plus accrédités qu’ils sont moins médecins, et qui ordinairement se font un titre ou d’un savoir incompréhensible et visionnaire, ou même de leur ignorance, ont trop souvent puni la crédulité de leurs malades ; et malgré l’amour des hommes pour l’extraordinaire, malgré quelques succès de cet extraordinaire, un sage préjugé est toujours pour la règle.

Ce n’est pas que Fagon rejetât tout ce qui s’appelle