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DISCOURS.

qui joint d’un lien commun et l’Espagnol et le Batave, et le Bavarois et le Saxon ; qui, pour de plus vastes desseins encore, fait concourir les mouvements de l’Asie avec ceux de l’Europe, et qui montre une seconde fois, comme sous l’Empire romain, le génie guerrier s’armant de toutes les forces de la civilisation, s’avançant contre les barbares, et les forçant de reculer vers les bornes du monde !

Ce n’est point à moi de lever le voile qui couvre le but de ces expéditions lointaines ; il me suffit de savoir que le grand homme, par qui elles sont dirigées, n’est pas moins admirable dans ce qu’il cache que dans ce qu’il laisse voir, et dans ce qu’il médite, que dans ce qu’il exécute. Veut-il relever ces antiques barrières qui retenaient, aux confins de l’univers police, toutes ces hordes barbares dont le Nord menaça toujours le Midi ? Sa politique n’a point encore parlé ; attendons qu’il s’explique, et remarquons surtout que ce silence est le plus sur garant de ses intentions pacifiques.

Il a voulu, il veut encore la paix : il la demanda au moment de vaincre, il la redemande après avoir vaincu. Quoique tous les champs de bataille qu’il a parcourus dans trois parties du monde, aient été les théâtres constants de sa gloire, il a toujours gémi des désastres de la guerre. C’est parce qu’il en connait tous les fléaux, qu’il a soin de les porter loin de nous. Cette grande vue de son génie militaire est un grand bienfait : il faut payer la guerre avec les subsides étrangers, pour ne pas trop aggraver les charges natio-