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SUR THOMAS.

lon qui réunissait dans sa conduite et dans ses écrits ce que le goût a de plus pur, et ce que la vertu a de plus aimable. Au contraire, les physionomies de Daguesseau, de Duguay-Trouin, de Descartes et de Sully ont trop souvent le même dessin et la même couleur. Quoi qu’íl en soit, ces deux écrivains, avec des qualités différentes, ont honoré l’éloquence française vers la fin du dix-huitième siècle ; j’ai entendu comparer quelquefois le genre cultivé par eux, à celui de l’oraison funèbre que porta si haut le génie de Bossuet, et qu’orna si bien l’art de Fléchier. Mais il me semble que ces discours académiques, dont je reconnais d’ailleurs tout le mérite, ne pouvaient jamais fournir les mêmes ressources à l’orateur et produire d’aussi fortes impressions.

Rapprochez un moment les lieux, les siècles, les circonstances. Revoyez autour de la tribune sacrée cette foule auguste, ces nombreux auditoires composés de ce que la nation avait de plus grand et de plus éclairé sous le règne de Louis XIV, et jugez où sont les plus sûrs moyens d’émouvoir le cœur, et de frapper vivement l’imagination.

Quand Fléchier, quand Bossuet montaient dans la chaire pour louer Turenne ou Condé, la patrie en deuil déplorait la perte récente de ces deux héros. Les éloges de tout un peuple répondaient à ceux de l’orateur ; et par combien de spectacles l’orateur lui-même était enflammé ! Ses premiers regards tombaient sur les restes du grand homme dont la mémoire lui était confiée par la reconnaissance publi-