Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/247

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
244
ŒUVRES DE FONTANES.

bat Adraste au milieu de tous les dangers. C’est contre la volupté seule qu’elle accourt le défendre ; c’est alors qu’il en a le plus grand besoin. Une telle allégorie est belle, sans doute ; mais le reste cache des vérités plus sublimes encore. La fille du maître des Dieux, la Sagesse divine elle-même se soumet sans murmures à tous les opprobres de la servitude, et les ennoblit par une pieuse résignation. N’est-ce pas déguiser sous des noms mythologiques ce qu’il y a de plus élevé dans la théologie chrétienne ? Et quelles plus grandes leçons peuvent être données au roi que veut instruire Minerve ! Elle lui apprend le respect qu’il doit à tous les hommes, en les montrant tous égaux devant le Ciel, et surtout en acceptant elle-même les plus viles fonctions de la société. Mais, lorsqu’elle réprime avec tant de soin l’orgueil de la puissance souveraine, voyez comme elle apaise les ressentiments séditieux de la mauvaise fortune, en inspirant à l’esclave la crainte des Dieux qui récompenseront sa fidélité. Peut-on expliquer sous des images plus heureuses toute l’harmonie sociale, et les devoirs réciproques des divers états qui l’entretiennent ? Ah ! sans doute ces instructions, puisées à la source du vrai et du beau, sont dignes d’avoir pour interprète Minerve même, c’est-à-dire intelligence qui gouverne l’univers. Comparez à cette morale si utile et si touchante les maximes d’éducation qu’a trop répandues le style véhément et passionné de J.-J. Rousseau ; lisez, sans prévention Émile et Télémaque, et jugez la philosophie des deux siècles, indépen-