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ŒUVRES DE FONTANES.

verses, les instructions édifiantes pouvaient suffire à des siècles éminemment religieux. Des traités austères, tels que ceux de Nicole et d’Abadie, étaient lus avec empressement par les mêmes hommes qui goûtaient le mieux le génie et les grâces de Racine et de La Fontaine, leurs contemporains. Alors, dans les cercles de la ville et parmi les intrigues de la cour, dans le sénat et dans l’armée, on agitait les mêmes questions que dans l’Église. Il ne faut point s’en étonner : la religion chrétienne, à cette époque, semblait à tous l’objet le plus important. Le petit nombre de ceux qui osaient l’attaquer dans ses premières bases, n’obtenait que le mépris ou l’horreur. Le nom du Dieu qui l’avait fondée imprimait une égale vénération à toutes les sectes rivales dont elle était la mère, et qui combattaient dans son sein. Ces sectes, divisées sur quelques points, s’accordaient sur les dogmes fondamentaux. Leurs disputes avaient en conséquence ce caractère et ces mouvements passionnés que mettent toujours dans leurs débats les membres d’une famille divisée. Rappelez-vous en effet les anecdotes de ces jours célèbres ; voyez dans le palais de la duchesse de Longueville les redoutables chefs de Port-Royal méditer de nouvelles attaques contre les jésuites rassemblés à Versailles sous la protection du confesseur du roi. La France était attentive à ces querelles, et se décidait pour l’un ou pour l’autre parti. Apprenait-on que le ministre Claude et l’évêque de Meaux étaient en présence, on contemplait avec curiosité l’approche des deux athlètes, et tous les cœurs