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DE LA LITTÉRATURE.

ques, sans analyser ni les caractères ni les principes. Ils vous peignent, pour ainsi dire, la conduite des hommes comme la végétation des plantes, sans porter sur elles un jugement de réflexion. »

C’est Hérodote, sans doute, qu’on prétend désigner. Il serait facile de prouver, avec ses seuls ouvrages. que les historiens grecs sont remontés plus d’une fois aux causes des événements, aux principes des institutions, aux origines des lois et des peuples. Les vérités morales sortent en foule de leurs narrations et de leurs tableaux. Mais, si l’autorité d’Hérodote ne parait pas suffisante aux détracteurs de l’antiquité, on ne contestera pas du moins cette espèce de mérite à Thucydide. Madame de Staël ne fait pas la moindre mention de cet historien si philosophe, au jugement de Cicéron, et qui fut le maître de Démosthène et de Tacite. Peut-elle connaître aussi peu les faits, les époques et les écrivains qu’elle veut juger ? Eh quoi ! n’a-t-elle jamais lu dans Thucydide le récit des malheurs et des factions qui désolaient Corcyre ? Y eut-il jamais un tableau plus instructif et plus éloquent des fureurs de l’anarchie ? Et si elle connait ce morceau sublime et tant d’autres, comment ne trouve-t-elle pas des pensées profondes et des résultats philosophiques dans les historiens de la Grèce ?

Une nouvelle contradiction frappe le lecteur dans les chapitres suivants, sur la littérature romaine. L’auteur nous y dit que, pour bien écrire l’histoire, la philosophie n’est point nécessaire. Et pourquoi donc reprocher aux Grecs d’en avoir manqué ? que devien-