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M. DE FONTANES

l’Empereur l’avait désigné pour le voyage de Fontainebleau ; c’était, à une certaine politesse près, comme les Fontainebleau et les Marly de Louis XIV, et le plus précieux signe de la faveur souveraine. Il se rendit à l’ordre, et, dans la galerie du château, après le défilé d’usage, l’Empereur, repassant devant lui, lui dit : Restez ; et quand ils furent seuls, il continua : « Il y a longtemps que je vous boude, vous avez dû vous en apercevoir ; j’avais bien raison. » Et comme Fontanes s’inclinait en silence, et de l’air de ne pas savoir : « Quoi ? vous m’avez donné un soufflet à la face de l’Europe, et sans que je pusse m’en fâcher… Mais je ne vous en veux plus ; … c’est fini. »

Durant cette année 1809, Fontanes, comme grand-maître, avait eu à lutter contre toutes sortes de difficultés et de dégoûts : de perpétuels conflits, soit avec le ministre de l’intérieur, duquel il se voulait indépendant, soit avec Fourcroy, resté directeur de l’instruction publique et qui ne pouvait se faire à l’idée d’abdiquer, allaient rendre intolérable une situation dans laquelle la bienveillance impériale ne l’entourait plus. Il offrait vivement sa démission : « D’un côté, écrivait-il, je vois un ministre qui surveille l’instruction publique, de l’autre un conseiller d’État qui la dirige ; je cherche la place du grand-maître, et je ne la trouve pas. » Il récidiva cette offre pressante de démission jusqu’à trois fois. La troisième (c’était sans doute après le voyage de Fontainebleau), l’Empereur lui dit : « Je n’en veux pas, de votre démission ; s’il y a quelque chose à faire, exposez-le-moi dans un mémoire, j’en prendrai connaissance moi-même ; j’y répondrai. » La rentrée ouverte de Fontanes dans les bonnes grâces du chef aplanit dès lors beaucoup de choses.

Dès septembre 1808, et aussitôt qu’il avait été nommé grand maître, Fontanes avait songé à faire de l’Université l’asile de bien des hommes honorables et instruits, battus par la révolution, soit membres du clergé, soit débris des anciens ordres, des oratoriens, par exemple, pour lesquels il avait conservé