plus active, l’influence politique surtout et l’expression métaphysique, le révoltaient chez une femme, et lui paraissaient tellement sortir du sexe, qu’à lui-même il lui arriva, cette fois, de l’oublier. Madame de Staël ne se vengea qu’en retrouvant à l’instant son rôle de femme qu’on l’accusait d’abandonner, et en le marquant par la bonne grâce supérieure et inaltérable de ses réponses[1].
Pour revenir au Mémorial, l’ensemble de la rédaction de Fontanes dans cette feuille nous montre un esprit dès lors aussi mûr en tout que distingué, qui ne reviendra plus sur ses impressions, et qui, dans la science de la vie, est maître de ses résultats. La connaissance de cette rédaction est précieuse en ce qu’elle nous le révèle, à cette époque d’entière indépendance, essentiellement tel, au fond, qu’il se développera plus tard dans ses rôles publics et officiels ; avec tous ses principes, ses sentiments, ses aversions même ; journaliste louant déjà Washington[2] dans le sens où, orateur, il le célébrera devant le premier Consul ; attaquant déjà madame de Staël, avant qu’on le puisse soupçonner par là de vouloir complaire à quelqu’un.
Mais le pressentiment le plus notable de Fontanes, à cette date, est son goût déclaré pour le général Bonaparte, alors conquérant de l’Italie. Le 15 août 1797, il lui adresse, dans le Mémorial, une lettre trop piquante de verve et trop perçante de pronostic, pour qu’on ne la reproduise pas. C’est un de ces petits chefs-d’œuvre de la presse politique, comme il s’en est tant dépensé et perdu en France depuis la Satyre Ménippée jusqu’à Carrel : sauvons du moins cette page-là. Le bruit venait de se répandre dans Paris qu’une révolution républicaine avait éclaté à Rome et y avait changé la forme du gouvernement :