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ŒUVRES DE FONTANES.

 « On vit trembler l’audacieux
 « Et l’infortune respectée
« De ses persécuteurs osa braver les yeux. »
Il se tait ; je m’avance, et des mains de mon père
Je prends avec respect la lance héréditaire.
Ô mon père ! ô Fingal ! ô mes braves aïeux !
Je n’en ai point flétri l’éclat victorieux.
Mais des plus grands héros qu’il reste peu de trace !
Que font au siècle ingrat nos travaux glorieux ?
La main du froid oubli par degré les efface.

Heureux qui, jeune encore, au milieu des combats
À côté des héros trouve un noble trépas !
Faible, et pleurant un jour sa vigueur épuisée,
Il ne cachera point dans ses foyers déserts
 Une vieillesse méprisée,
Et son bras affaibli, du lâche et du pervers
 N’excitera point la risée.
Il emporte avec lui sa gloire et ses honneurs ;
L’amitié s’attendrit au moment qu’il succombe ;
Son nom est honoré par des chants de douleurs,
 Et près de son illustre tombe
Les filles de Morven passent les yeux en pleurs.
Mais plaignons les vieillards qui trop longtemps vécurent ;
Leurs braves compagnons, leurs amis disparurent ;
Ils meurent inconnus : aucun fils après eux
Ne redit leurs exploits à ses jeunes neveux ;
 Et, dans la demeure fatale,
 Quand ils descendent pour jamais,