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LA GRÈCE SAUVÉE.

« Je sens contre le sort mon âme s’affermir,
« Et de mes propres maux je n’ose plus gémir.
« De force et de constance, ô quelle auguste école !
« Des jeux de la fortune ici tout me console.
« Roi de Sparte, il est temps, prononce mon arrêt ;
« Sous l’œil des Dieux des morts, je t’ai dit mon secret. »

 La voix de Strophius a pénétré nos âmes :
« Va, je respecterai les Dieux que tu réclames,
« Répond Léonidas ; ne redoute plus rien,
« Embrasse-moi : remonte au rang de citoyen.
« Tu deviens aujourd’hui mon allié, mon hôte ;
« Tes maux et tes remords ont expié ta faute,
« Et la Grèce l’oublie en recevant ta foi.
« Viens contre les Persans la servir avec moi.
« Et lorsque la patrie en son sein te rappelle,
« Prouve-lui que ton cœur lui fut toujours fidèle.
« Prends ce glaive et marchons. » Le roi dit, et soudain
Strophius saisissant le glaive dans sa main :
« Oh ! qu’on voit bien qu’Hercule est l’auteur de ta race !
« Grand homme, criait-il, à tes pieds que j’embrasse.
« Je jure par ce fer que ta main m’a remis,
« Par toi, par ces héros dans la tombe endormis,
« Je jure de venger notre cause commune.
« Ce jour m’a consolé de quinze ans d’infortune.
« Ah ! si les compagnons de ma longue douleur
« Pouvaient auprès de moi jouir de mon bonheur !
« Pardonne à ce souhait, ô guerrier magnanime !
« Pardonne, mais les Grecs qu’un long exil opprime,
« S’indignent de fléchir sous un joug étranger ;