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ŒUVRES DE FONTANES.

« Redemanda bientôt le ciel de ma patrie.
« De son doux souvenir en tous les temps frappé.
« Seul, du camp de Xerxès je me suis échappé,
« Et, fuyant du grand Roi les dons et l’opulence,
« J’ai revêtu l’habit qui couvre l’indigence ;
« J’ai déguisé mon nom, et, sous ces vils lambeaux.
« J’erre depuis trois jours, caché dans ces tombeaux.
« Les lieux où je naquis auront du moins ma cendre.
« Hélas ! de tous les biens que j’y pouvais attendre.
« L’espace d’un cercueil est tout ce que je veux. »

 En achevant ces mots, le guerrier malheureux
Montrait d’Agamemnon la pierre sépulcrale :
« Contlemplez, criait-il, les enfants de Tantale ;
« Voilà ce qui leur reste, ô Grecs ! instruisez-vous ;
« De la fatalité craignez aussi les coups ;
« De ces rois sans flatteurs, sans cour, sans diadème,
« Consultons aujourd’hui le tribunal suprême.
« Leur voix va nous crier de la nuit du trépas :
« Malheur à qui se venge et ne pardonne pas !
« Ô Grecs ! obéissons à cette voix sacrée.
« La mort a réuni Thyeste, Érope, Atrée,
« Et des plus fiers rivaux désarmant la fureur,
« Non loin des opprimés a couché l’oppresseur.
« Ici plus de discorde, ici la haine expire.
« Ah ! que de tous ces morts l’éloquence a d’empire !
« J’écoute, et j’apprends d’eux, en ce fatal séjour,
« Comme on doit du Destin supporter le retour.
« Oui : devant leur grandeur tant de fois renversée,
« Sur leurs sceptres rompus, sur leur cendre entassée.