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LA GRÈCE SAUVÉE.

Ô chef des Thespiens ! je ne t’oublierai pas ;
Sept cents guerriers choisis ont marché sur tes pas.
Malheur aux seuls Thébains ! leur lâche prévoyance,
Dès longtemps du grand roi conjurant la vengeance,
Ne s’arma qu’à regret contre un joug étranger ;
De leur perfide appui j’entrevis le danger.
Ô honte ! et dois-je, hélas ! révéler leur bassesse ?
Des Grecs pour un monarque ont pu trahir la Grèce !

 Tandis que notre camp s’accroît de jour en jour,
Nous voyons dans ces bois, par un secret détour,
Du camp des ennemis s’échapper un transfuge :
En pur accent dorique il demande un refuge.
« Ô Grecs ! s’écria-t-il, je suis né dans Argos,
« Euryclès est mon nom : d’avares matelots
« M’ont ravi, jeune encor, sur les mers d’Ionie ;
« J’ai du joug du grand Roi subi l’ignominie,
« Et même de sa cour j’ai connu les attraits,
« Mais ma douce patrie eut toujours mes regrets.
« Ah ! chez des Grecs encor permettez que je vive,
« Permettez que du moins mon âme fugitive,
« Parmi tant de héros, s’exhale sous les cieux
« Où j’ai vu la lumière, où sont morts mes aïeux ! »

 Sa voix nous attendrit : on l’accueille, on l’embrassa.
Bientôt il nous-apprend que dans sa folle audace
Xerxès a ravagé les bords du Sperchius,
Et qu’il mène avec lui le fier Mardonius,
Ce guerrier dont la haine a sur notre patrie
De tant de nations déchainé la furie.