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LA GRÈCE SAUVÉE.

Ainsi les demi-dieux s’entretiennent sans doute,
Quand, montant de la terre à la céleste voûte,
Ils y daignent encore abaisser un coup d’œil,
Et compatir aux pleurs qui suivent leur cercueil.
La nuit fuyait en vain : la mort en vain s’avance,
D’un bonheur immortel ils goûtaient l’espérance,
Lorsque du jour naissent le rayon trop fatal
Du terrible départ vient donner le signal.
Amyclé la première et le voit et frissonne.
Soudain d’un bruit guerrier la ville au loin résonne,
Le belliqueux airain convoque les soldats
Qui dans les champs d’honneur suivront Léonidas.
Le bruit croit et parvient à ses fils qui sommeillent ;
Au repos arrachés, ils se troublent, s’éveillent ;
Mais, l’ainé qui déjà compte un lustre et deux ans,
Loin d’être épouvanté par ces sons menaçants,
D’une valeur précoce épouvantant sa mère,
Prend de sa faible main la lance de son père,
Et sous ce noble poids il cherche à s’affermir.
Il voit son jeune frère et pleurer et frémír ;
Il rit de son effroi, lui rend un peu d’audace,
L’aguerrit en jouant, le console et l’embrasse :
Leur tendresse naïve a charmé leurs parents.

 « Ô Dieux ! vous commandez, à vos lois je me rends ;
« Dieux ! cria le héros, que votre œil tutélaire
« Daigne voir en pitié ces enfants et leur mère !
« Dieux ! qu’ils s’aiment toujours ! que, soumis à sa voix,
« De Sparte, comme nous, ils respectent les lois !
« Ô ma chère Amyclé, que chacun te ressemble !