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ŒUVRES DE FONTANES.

Que sous l’herbe en tous lieux ta pourpre se noircisse
Et que la giroflée en montant s’épaississe.
Mariez le jasmin, le lilas, l’églantier,
Et surtout que la rose, embaumant ce sentier,
Brille comme le teint de la vierge ingénue
Que l’amour fait rougir d’une flamme inconnue.
Ces trésors pour vous seuls ne doivent pas fleurir ;
À la jeune bergère on aime à les offrir.
Elle rend un sourire : hélas ! belle rosière,
D’autres amis des mœurs doteront ta chaumière ;
Mes présents ne sont point une ferme, un troupeau,
Mais je puis d’une rose embellir ton chapeau.

 Ô fleurs ! en tous les temps égayez ma retraite,
Et plus heureux que moi, puisse un autre poëte
Peindre sous des crayons frais comme vos couleurs,
Vos traits, vos doux instincts, vos sexes et vos mœurs.
L’amour, dont vos parfums enflamment le délire,
Souvent, par vos bouquets, étendit son empire.
Ô fleurs, qui tant de fois avez servi l’amour,
Votre sein virginal le ressent à son tour ;
Non, vous n’ignorez point les humains délices ;
Vainement la pudeur au fond de vos calices
Cacha de vos plaisirs le charme clandestin ;
Les Zéphirs, précurseurs du soir et du matin,
Les Zéphirs les ont vus, et leur voix fortunée
Raconte aux verts bosquets votre aimable hyménée.

 Cependant si mon œil veut un jour de plus près
De vos lits amoureux surprendre les secrets,