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ŒUVRES DE FONTANES.

Sous l’astre aux sept couleurs prend un teint plus vermeil.
Alors de ses présents vous cueillez les prémices.
De leurs doubles parfums confondant les délices,
La fraise et la framboise ont charmé l’odorat.
Comme elles, de sa pourpre étalant tout l’éclat,
Le fruit de Cérasonte, à côté des groseilles,
À des riants desserts couronné les corbeilles.
La pêche flatte l’œil et la bouche, et la main,
De sa chair embaumée, et de son doux carmin.
La ligue, en brunissant, à son tour vous appelle ;
L’oranger a jauni, la grenade étincelle ;
En variant son goût, le prunier s’est couvert
De nuances d’azur, d’or, de pourpre et de vert.
Du poirier, né gaulois, les tribus innombrables
Sans cesse enrichiront le luxe de vos tables.
Chaque espèce à son temps : la fermière en fait choix,
Et d’une main soigneuse, à l’abri de vos toits
Conserve la fraîcheur de ces poires tardives
Qui, jusqu’à l’autre été, charmeront vos convives.
L’automne épanche enfin ses dernières faveurs,
Et rougit d’un vin pur la coupe des buveurs.
Les ceps sont dépouillés, déjà tombe leur feuille ;
Et le coing plus tardif après eux se recueille.
N’ai-je pas entendu les branches du noyer
Sous vos coups vigoureux et gémir et ployer ?
Les noix, autour de vous, roulent sur la verdure.
Arbre heureux ! du hameau ton ombre est la parure ;
Ton fruit, quand le banquet déjà touche à sa fin,
Sait irriter encore et la soif et la faim ;
Et par les flots choisis de la liqueur dorée,