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LA MAISON RUSTIQUE.

Peins, sous les flots ardents que vomissent les airs,
La caravane errante au milieu des déserts.
Oh ! lorsque de palmiers la citerne entourée,
De loin, promet son onde à la horde altérée,
Peins les joyeux transports ; montre-moi le chameau
Et courbant ses genoux et posant son fardeau ;
Rappelle-moi les mœurs de ces temps héroïques
Où les filles des rois, dans les sources publiques,
Venaient blanchir le fin qu’ont filé leurs fuseaux.
Elles-mêmes puisaient les salutaires eaux,
Et couraient quelquefois, sur le seuil de leur tente,
Offrir à l’étranger l’urne rafraîchissante :
L’étranger admirait leur grâce et leur douceur,
Et bénissait la main propice au voyageur.

 Trop heureux qui découvre une onde souterraine !
Mais plus heureux encor celui dont le domaine
Est animé du bruit d’un ruisseau tournoyant
Qui brille aux feux du jour et gazouille en fuyant !
Si quelque fleuve même à longs replis étale
Les aspects variés de sa course inégale !…
Mais d’un vœu trop hardi redoutons le danger ;
Un ruisseau doit suffire au séjour du berger.

 Doctes amis des arts, ô vous dont la pensée
Des longs travaux du jour quelquefois est lassée,
Sortez de votre asyle à l’approche du soir,
Et ne rougissez point de pencher l’arrosoir.
Que des fruits et des fleurs la racine épuisée
Boire l’eau jaillissante en filets divisée ;