Page:Fontanes - Œuvres, tome 1.djvu/32

Cette page a été validée par deux contributeurs.
xxix
SUR M. DE FONTANES.

l’arrêt fatal est porté contre Louis ; ses vertueux défenseurs se voilent le visage et se réfugient dans le désert ; tout a pâli d’effroi, jusqu’à ses juges ; une consternation universelle s’est répandue de la capitale jusqu’aux provinces les plus reculées ; et, ce jour-là, dans la France entière, il n’y eut de calme et de serein que le front de l’auguste victime. »

Ayant à juger Fontanes comme orateur, nous avons cité des fragments de ses discours prononcés dans des positions et dans des circonstances diverses. Nous avons beaucoup cité, pour mieux éclairer à la fois le lecteur et nous-même. Nous aurions voulu citer davantage, car presque toutes ses nobles paroles furent en même temps de nobles actions.

Fontanes était né tout ensemble orateur et poëte ; et pourtant, il faut le reconnaître, il fut moins poëte qu’orateur. Mais, si sa poésie n’a pas toujours le mouvement, la variété et l’allure naturelle de sa prose, si le travail s’y fait quelquefois trop sentir, si l’on y trouve moins d’idées, et nous dirions presque moins d’originalité, on respire, dans l’une comme dans l’autre, un sentiment du beau, du bon, du vrai, qui vous attire et vous attache, un parfum d’harmonie et d’élégance classique, peu commune au temps où il écrivait, méconnue et dédaignée de nos jours. Le caractère principal du talent de Fontanes, prosateur ou poëte, c’est la pureté, c’est la dignité ; non la dignité pédantesque, mais la dignité compagne assidue de la simplicité et de la grâce. « Le génie enfante, dit M. de Châteaubriand dans l’ouvrage que nous avons déjà cité[1] ; le goût conserve ; le goût est le bon sens du génie ; sans le goût, le génie n’est qu’une sublime folie. Ce toucher sûr par qui la lyre ne rend que le son qu’elle doit rendre est encore plus rare que la faculté qui crée. » Que pourrions-nous ajouter à ces paroles ? Ne sont-elles pas à la fois l’éloge et la définition exacte du talent de Fontanes ?

La réputation de Fontanes, comme prosateur et surtout

  1. Essai sur la Littérature anglaise, t. 1er, p. 291.