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SUR M. DE FONTANES.

les refaire… cet été, j’aurai du loisir[1] ; je ferai la prose et vous les vers. »

Presque toutes les affaires de l’empire se délibéraient en conseil d’État. Les conseils privés étaient fort rares, et réservés pour les grandes occasions ; telles, par exemple, que le mode du couronnement de Napoléon, puis son divorce avec Josephine. Fontanes fut appelé à l’un et à l’autre de ces conseils. On sait que, dans le premier, il opina pour un sacre, au grand scandale des philosophes du conseil, et que, dans le second, il opina pour le divorce, auquel d’ailleurs l’autorité ecclésiastique avait donné d’avance son assentiment. Dans cette délibération, qui n’était probablement qu’une vaine formule, le sacrifice de Joséphine à la nécessité d’un héritier du trône fut unanimement résolu. « Nous savons, dit Fontanes, tout ce que ce sacrifice doit vous coûter ; mais c’est par cela même qu’il est plus digne de vous, et ce sera un jour une des belles pages de votre histoire. — Ce sera donc cous, monsieur, qui l’écrirez ! » lui répondit à l’instant l’empereur. Quel homme, et surtout quel écrivain n’aurait été flatté d’une louange si délicate, ajoutée à tant de bienfaits déjà reçus ? Aussi Fontanes ne dissimula jamais ni sa reconnaissance, ni son attachement personnel pour Bonaparte. De là le regret qui se mêla dans son âme à la satisfaction politique que lui donna la restauration. Quoiqu’il fût bien convaincu que le repos de la France et du monde était désormais impossible avec Napoléon, ce ne fut pas sans émotion qu’il vit s’approcher sa déchéance[2] ; et, quand il partit pour aller à Compiègne porter au roi de France l’adresse et les vœux de l’Université, il dit ingénument à un de ses amis : « J’aurais voulu qu’on me laissât du moins porter un deuil de quelques semaines. » Dès le 9 avril 1814, Fontanes avait reçu du gouvernement

  1. Cet été, où le conquérant se promettait du loisir, était celui de 1809 !
  2. Il est faux qu’il ait rédigé le décret sénatorial de déchéance, ainsi que l’avance une biographie moderne ; il n’y a pas un mot de lui.