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ŒUVRES DE FONTANES.

LE JOUR DES MORTS

DANS UNE CAMPAGNE[1]


 Déjà du haut des cieux, le cruel Sagittaire
Avait tendu son arc et ravageait la terre ;
Les coteaux et les champs, et les prés défleuris,
N’offraient de toutes parts que de vastes débris ;
Novembre avait compté sa première journée.

 Seul alors, et témoin du déclin de l’année,
Heureux de mon repos, je vivais dans les champs.
Eh ! quel poète, épris de leurs tableaux touchants,
Quel sensible mortel, des scènes de l’automne
N’a chéri quelquefois la beauté monotone !
Oh ! comme avec plaisir, la rêveuse douleur,
Le soir, foule à pas lents ces vallons sans couleur,
Cherche les bois jaunis, et se plait au murmure
Du vent qui fait tomber leur dernière verdure !
Ce bruit sourd a pour moi je ne sais quel attrait.
Tout à coup, si j’entends s’agiter la forêt,

  1. Cette pièce était composée déjà vers le temps de la Chartreuse et du poème sur l’Astronomie, bien qu’elle n’ait paru qu’après. Dès les années 1785, 1786, elle avait une sorte de publicité par la lectures qu’en faisait l’auteur, et on la citait comme la plus belle des élégies.