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ESSAI SUR L’ASTRONOMIE.

Qui mesurait des deux les campagnes profondes,
L’éternel Géomètre a terminé les mondes.
Atteins-les : vaine erreur ! Fais un pas : à l’instant
Un nouveau lieu succède, et l’univers s’étend.
Tu t’avances toujours, toujours il t’environne.
Quoi ? semblable au mortel que sa force abandonne,
Dieu, qui ne cesse point d’agir et d’enfanter,
Eût dit : « Voici la borne où je dois m’arrêter ! »
 Newton, qui, de ce Dieu le plus digne interprète,
Montra par quelles lois se meut chaque planète,
Newton n’a vu pourtant qu’un coin de l’univers ;
Les cieux, même après lui, d’un voile sont couverts.
Que de faits ignorés l’avenir doit y lire !
Ces astres, ces flambeaux, qu’en passant l’homme admire,
A qui le Guèbre antique élevait des autels,
Comme leur créateur seront-ils immortels ?
Au jour marqué par lui, la comète embrasée
Vient-elle réparer leur substance épuisée ?
Meurent-ils comme nous ? On dit que sur sa tour,
Quelquefois l’astronome, attendant leur retour,
Vit, dans des régions qu’il s’étonne d’atteindre,
Luire un astre nouveau, de vieux astres s’éteindre.
Tout passe donc, hélas ! Ces globes inconstants,
Cèdent comme le nôtre à l’empire du temps ;
Comme le nôtre, aussi, sans doute, ils ont vu naître
Une race pensante, avide de connaître ;
Ils ont eu des Pascal, des Leibnitz, des Buffons.
 Tandis que je me perds en ces rêves profonds,
Peut-être un habitant de Vénus, de Mercure,
De ce globe voisin qui blanchît l’ombre obscure,