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M. DE FONTANES

lui-même, qui commençait gravement à percer, lui dut sa première chaire[1]. Duperron, comme Fontanes, était, en son temps, un oracle souvent cité, un poëte rare et plus regretté que lu ; après avoir brillé par des essais trop épars, lui aussi il parut à un certain moment quitter la poésie pour les hautes dignités et la représentation officielle du goût à la cour.

Plus loin encore que Duperron, et à l’extrémité de notre horizon littéraire, je ne fais qu’indiquer comme analogue de Fontanes pour cette manière de rôle intermédiaire, Mellin de Saint-Gelais, élégant et sobre poëte, armé de goût, qui le dernier de l’école de Marot, sut se faire respecter de celle de Ronsard, et se maintint dans un fort grand état de considération à la cour de Henri II.

M. Villemain, d’abord disciple de M. de Fontanes dans la critique qu’il devait bientôt rajeunir et renouveler, l’allait visiter quelquefois dans ces années 1812 et 1813. La chute désormais trop évidente de l’empire, l’incertitude de ce qui suivrait, redoublaient dans l’âme de M. de Fontanes les tristesses et les rêveries du déclin :

Majoresque cadunt altis de montibus umbræ.


Sous le lent nuage sombre, l’entretien délicat et vif n’était que plus doux. M. de Fontanes avait souvent passé sa journée à relire quelque beau passage de Lucrèce et de Virgile, à noter sur les pages blanches intercalés dans chacun de ses volumes favoris quelques réflexions plutôt morales que philologiques, quelques essais de traduction fidèle : « J’ai travaillé ce matin, disait-il ; ces vers de Virgile, vous savez :

Et varios ponit fœtus autumnus, et alté
Mitis in aprieis coquitnr vindemia saxis ;

  1. C’est ainsi encore qu’il poussa très vivement, par un article au Journal de l’Empire (8 janvier 1806), et par ses éloges en tout lieu, au succès du début tout à fait distingué de M. Molé.