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respondances entre l’archaïsme grec et l’archaïsme gothique, entre l’art grec du ve siècle et les figures de la première moitié de notre xiiie, entre l’art flamboyant, cet art baroque du gothique, et l’art rococo. L’histoire des formes ne se dessine pas par une ligne unique et ascendante. Un style prend fin, un autre naît à la vie. L’homme est contraint de recommencer les mêmes recherches, et c’est le même homme, j’entends la constance et l’identité de l’esprit humain, qui les recommence.

L’état expérimental est celui où le style cherche à se définir. On l’appelle généralement archaïsme, en conférant à ce terme une acception péjorative ou favorable, selon que l’on y voit un grossier balbutiement ou une verte promesse, ou plutôt selon le moment où nous nous trouvons nous-mêmes placés. En suivant, au xie siècle, l’histoire de la sculpture de style roman, nous voyons par quelles expériences, apparemment désordonnées et « grossières », la forme cherche à faire son profit des variations ornementales et à y incorporer l’homme même, en l’adaptant ainsi à certaines fonctions architecturales. L’homme ne s’impose pas encore comme objet d’étude, encore moins comme mesure universelle. Le traitement plastique respecte la puissance des masses, leur densité de bloc ou de mur. Le modelé reste à la surface, comme une ondulation légère. Les plis, minces et peu profonds, ont la valeur d’une écriture. Ainsi procèdent tous les archaïsmes : l’art grec commence lui aussi par cette unité massive, par cette plénitude et cette densité ; il rêve lui aussi sur les monstres, qu’il n’a pas encore humanisés ; il n’est pas encore obsédé par la musicalité des proportions humaines, dont les divers canons scanderont son âge classique ; il ne cherche ses variations que dans l’ordre architectural, qu’il conçoit d’abord avec épaisseur. Dans l’archaïsme roman comme dans l’archaïsme grec, les expériences se succèdent avec une rapidité déconcertante. Le vie siècle comme le xie suffisent à l’élaboration d’un style ; la première moitié du ve siècle et le premier tiers du xiie