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(les prêtres) viennent d’apparaître à la lumière franche de la grande cour : en deux files parallèles, lentement, ils descendent les marches. En avant, deux enfants dont les longs vêtements de tulle brodés sont recouverts d’une étroite écharpe de soie qui traîne derrière eux. Ils sont coiffés d’une couronne en cuivre doré avec des pendeloques, leur visage est fardé, leurs lèvres rougies au carmin, leurs yeux noircis au khol. Devant eux, des nattes posées bout à bout sur le sable de la grande cour leur indiquent l’évolution de la marche qu’ils doivent accomplir. La procession avance ainsi lentement, de sourds répons répètent la prière de l’abbé, qui, mitré et dans un manteau de soies floches, s’avance derrière le dais aux longues franges pendantes qu’un prêtre porte sur un long bâton. Et, à petits pas, interrompus par de courts arrêts, la procession dans son évolution lente rentre au temple par le grand porche principal. »

À la paix des dieux répond la paix des morts. Ils sont là par milliers, et depuis des siècles. Les royaux ombrages de la montagne abritent leurs tombes. Le monastère du Kô-ya-san n’est pas seulement une vaste cité de temples et de chapelles, c’est la plus solennelle et la plus mélancolique des nécropoles. Dans la brume légère qui monte d’un sol trempé par les pluies, entre les verdures tremblantes, des stèles grises se répandent sur les pentes. Elles jalonnent les âges. Tout un peuple immense est venu s’ensevelir là, dans la torpeur verte et dorée du grand bois solitaire, et