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si l’on veut, un désavantage plastique quand on le compare au fourmillant polythéisme de l’Inde.

Mais, chez les adeptes, il n’y avait pas seulement des inquiétudes métaphysiques, il y avait des besoins de dévotion. Au principe de la réforme philosophique, le peuple associa, probablement dès l’origine de sa diffusion, les antiques divinités brahmaniques. À chaque tournant de la légende on les voit apparaître sans déguisement. À la naissance du Bouddha, Brahma et Indra descendent du haut des cieux pour l’adorer. Les Apsaras tendent sous l’enfant divin un réseau d’étoiles. Mara, le Tentateur ou le Trompeur, est aussi Kama, le dieu de l’amour, et c’est Kama qui a enseigné aux trois tentatrices chargées d’éprouver le Sage les trente-deux magies de la femme. Au moment où il entre dans le Nirvana, les dieux brahmaniques profèrent eux-mêmes avec solennité les vérités essentielles du Bouddhisme. Ils apportaient avec eux toute une vieille richesse iconographique.

Surtout, la doctrine avait le mérite incomparable d’avoir été fondée et divulguée par un de ces sages errants qui étonnaient les peuples et dont « l’histoire » était une inépuisable merveille. Les grandes formules cosmogoniques, la légende des amours des dieux et de leurs combats sont un fertile aliment à l’imagination populaire, — mais une extraordinaire suite d’aventures, d’épreuves, de miracles, de conversions fait un tissu asiatique plus complexe, plus varié, plus