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« … Les rochers sont les os du ciel et de la terre, et leur noblesse est faite d’âpreté et de profondeur. La rosée et l’eau sont le sang du ciel et de la terre, et tout ce qui coule librement est un noble sang.

« … En peinture, les rochers et les forêts doivent éminemment avoir raison. Un pin puissant doit être peint tout le premier : c’est le patriarche, et dans la mêlée des arbres, des graminées, des plantes grimpantes, des cailloux et des rochers qui l’entourent, comme des sujets qu’il regarde de haut, il est comme un sage au-dessus des hommes inférieurs.

« … Un véritable artiste doit nourrir en son âme la douceur, la beauté, la magnanimité. Il lui faut en lui-même d’aimables pensées et des idées, des pensées de celles qu’Ichokushi appelait onctueuses comme l’huile…

« … N’avoir jamais qu’une sorte de coup de pinceau, c’est ne pas avoir du tout de coup de pinceau, — et ne se servir que d’une sorte d’encre, c’est ne rien connaître à l’encrage. Aussi, quoique la brosse et l’encre soient les choses les plus simples du monde, très peu d’artistes savent comment les manier avec liberté.

« … Ici, dans mes jours de loisir, je lis de vieilles poésies et des nouvelles, et j’extrais de stances admirables ce que je sens être l’expression complète de ce que mon âme ressent. Les anciens sages disaient qu’un poème est une peinture sans forme visible, et qu’une peinture est une poésie qui a pris forme. Ces paroles sont sans cesse en moi. »