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C’est dans la seconde moitié du viie siècle que le rayonnement du génie grec touche directement la Corée, peut-être à la suite de l’annexion éphémère du pays par les Thang. Comme la Héra de Samos, la Kwannon du pavillon Tô-en-dô, à Nara, est asiatique par le bas, les plis sont étroits, l’étoffe du manteau est traitée dans une matière mince, avec un sentiment nerveux : ce sont là des traces encore de ce style exquis, féminin, nuancé de sécheresse, qui caractérise la Corée à la fin du vie siècle ; mais la plénitude délicate du cou, de la gorge et des épaules, l’ovale parfait du visage, son expression suavement majestueuse, l’élégance des bras et des mains placent cette œuvre au sommet de l’art gréco-bouddhique. Ce n’est pas une pâle et impersonnelle copie de la statuaire gandharienne. Sur les rives de la mer orientale, la pensée asiatique a traité avec personnalité l’enseignement qui lui est venu par le nord de la Chine. Le véritable territoire de cet art grec d’Asie est là, et dans l’archipel volcanique où une élite humaine en recueille et en interprète à son tour les leçons.

On ne peut songer à séparer l’art japonais de ce temps de l’art Thang. Nous le verrons, toute la vie japonaise peut être considérée, sans abus de termes, comme une œuvre d’art bouddhique. Mais, avant d’être proprement nationale, l’histoire de l’art au Japon s’ouvre sur un chapitre sino-coréen. La belle Kwannon coréenne de bronze clair du pavillon Tô-en-dô détermina toute une émulation et sans doute une influence for-